« Perfect day » – Lou Reed (1972)

Mathilde
12 avril 2018

Les voyageurs au long terme que nous croisons, ceux dont nous lisons les commentaires sur les différents sites et applications, partagent entre eux quelques traits de caractères pour le meilleur et pour le pire :

  • Le voyageur n’aime pas les touristes, parce que le voyageur n’est pas un touriste « comme les autres » et tout comme nous, il regarde de haut ce pauvre individu qui ne dispose que de deux semaines de vacances, qui est tributaire des tours organisés les plus efficaces (j’entends : voir le maximum de choses en un minimum de temps). Le voyageur voit donc beaucoup moins de choses que le touriste … Ah non pardon le voyageur voit de « l’authentique », du « vrai », du « local », du « hors des sentiers battus » ! … Bon allez pas vraiment, en fait il prend son temps et parfois se perd (hors des sentiers battus) …
  • Le voyageur en camping-car a un nom de code, qui est en principe le nom de son blog et ainsi quand nous rencontrons nos homologues (famille française en camping-car : espèce finalement assez commune de ce côté de l’Atlantique), ils nous parlent de leurs rencontres, non pas en utilisant le patronyme des personnes qu’ils croisent mais leur nom de blog (« tiens on a passé quelques jours avec les 749», « on a croisé les 101 km et des poussières à Salta » …). Je pense et j’espère que personne ne connait l’adresse de notre blog et que personne ne m’appelle « Mme Emmenez-moi au bout de la terre » ;
  • Le voyageur de long terme s’est fait faire des cartes de visites, voir des cartes postales et des autocollants à l’effigie de son voyage, ainsi en haut de certains sommets, aux frontières les plus mythiques, on peut trouver des pas de mur ou des piliers couverts d’autocollants, comme des drapeaux qu’on planterait histoire que tout le monde sache : « JE suis passé par LA » ;
  • Le voyageur surtout n’aime pas dépenser d’argent, le voyageur pourrait presque être malhonnête mais en général il s’indigne (  » non mais vous vous rendez compte, ils proposent des repas à 20 sols – 5 euros – mais ils nous prennent vraiment pour des pigeons !! ») Il est vrai que le pauvre voyageur ne peut pas trop dépenser d’argent, il ne travaille pas pendant des mois voire des années, pauvre voyageur !!!), alors le voyageur trouve souvent une combine (souvent expérimenté par un autre voyageur tout aussi radin que lui).

Ainsi pour le Machu Picchu la combine est la suivante :

Le Machu Picchu est très très touristique mais le Machu Picchu est une des sept merveilles du Monde (actuel et non du monde antique). Le Machu Picchu est au Pérou, pays où tu manges pour 1 à 4 euros (5 dans les endroits effrontément touristiques), où l’essence n’est pas chère, les souvenirs et l’artisanat à un prix très raisonnable, alors évidemment quand tu comprends (au bout d’un bon moment que aller au Machu Picchu par ses propres moyens est très compliqué et que d’y aller en utilisant les transports touristiques est hors de prix, tu suis la combine du voyageur, qui a le temps et surtout envie, par-dessus tout, de dépenser moins que ces « pigeons de touristes ».

 

 

Ces ruines incas qui, comme le soulignent très justement les guides touristiques justifient à elles seules de franchir l’Atlantique, se trouvent au sommet d’une « montagnette ». Elles sont accessibles soit en bus soit à pied par un escalier (nous y reviendrons) … Mais là où ça se complique, c’est que le point de départ des bus, un village baptisé Aguas Callientes (ou Machu Picchu Pueblo), n’est accessible qu’en train (oui mais comment ils sont venus les bus ? Ben on imagine en train en fait. Le train depuis Cusco (ou une autre ville environnante) suit un trajet relativement court le long du fleuve Urumbumba pour la « modique » somme d’une cinquantaine d’euros, puis le bus (une dizaine de minutes encore 12 euros, puis l’entrée 40 euros quand même, puis le retour souvent difficile dans la même journée (donc le coût d’une chambre d’hotel).  Donc le voyageur qu’il soit comme nous avec son propre véhicule ou routard fauché se débrouille pour accéder à un barrage hydraulique accessible par une route trop périlleuse, trop vertigineuse en un mot : trop dangereuse … Mais le voyageur en a vue d’autre, croit-il, jusqu’à ce qu’il se trouve avec, à sa gauche, un précipice sans protection et à sa droite, une falaise qui s’effondre régulièrement sous l’effet des pluies répétées. Nous resterons d’ailleurs bloqués  une journée (à cause des nombreux éboulements qui ont bloqué la piste) avant de faire le retour et le lendemain un accident mortel (une touriste écrasée par un rocher dans un minibus sur cette même route) surviendra …

 

 

Ce barrage hydroélectrique est le terminus du train allant au Machu Picchu, la « combine » consiste à se lever à l’aube 5 heures du matin, parcourir 12 kilomètres le long de la voie ferrée (parfois SUR la voie ferrée, guettant le signal du train pour nous jeter sur le bas-côté) jusqu’au village où l’on peut acheter les précieux billets d’entrée, puis 2 kilomètres retour jusqu’à l’escalier, 1750 mètres d’escaliers et 700 mètres de dénivelés, puis on arpente le site (encore quelques kilomètres), puis on fait le retour : la descente d’escalier et la voie ferrée.

 

 

Seuls Virgile et moi avons tenté l’aventure (Isaac ayant été rattrapé par sa flemme et Bertrand s’étant « gentiment » dévoué pour garder Léonard qui n’aurai pas pu faire ce périple), avons parcouru nos 30 kilomètres dans la journée, étonnamment (vu qu’il pleuvait tous les jours) bénéficié d’une super météo ensoleillée, savamment ignoré les « touristes » venus en bus et en train et vraiment adoré le site. It was just a « Perfect day » …

2 comments on “« Perfect day » – Lou Reed (1972)”

  1. Vous êtes mes héros! Merci de partager vos aventures de voyageurs, Je me régale tellement en lisant tes histoires Mathilde. Vous nous manquez. Des bises

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