« L’auto-stoppeuse » – Renaud (1980)

Mathilde
12 février 2018

Un petit déjeuner frugal en guise de repas de Noël et nous repartons sur la célèbre Ruta 40 qui traverse l’Argentine du Nord au Sud. Pas de repos pour les braves, après 100 kilomètres de route bitumée sous une pluie de plus en plus dense la route devient piste. Malgré les avertissements des voyageurs sur notre application de « tourdumondiste », et surtout un panneau à l’entrée de la piste « Ne pas utiliser la route les jours de pluie », nous nous engageons sur quelques kilomètres avant de nous retrouver dans un champ de boue. Les quelques inconscients ayant choisi de braver à nos côtés les consignes patinent, glissent, dérapent et se couvrent d’une boue épaisse et collante. Pas complètement dupes du fait que nos 4 tonnes, notre propulsion arrière sans 4×4 ne nous avantagent pas vraiment, nous rebroussons chemin (en marche arrière sur quelques centaines de mètres). Après avoir hésité à prendre un détour de quelques 500 km vers l’ouest (à savoir se retrouver sur la route que nous avions emprunté quelques semaines plus tôt) également fortement déconseillée par temps de pluie, nous nous installons dans une station-service en attendant le beau temps (et en guettant les 4×4 couverts de boue qui s’arrêtent prendre de l’essence après avoir bravé la boue). Nous y passons la nuit. Par chance, le lendemain matin, le ciel s’est dégagé. Nous laissons passer la matinée afin que la piste sèche un peu avant de repartir vers 15h00 à l’assaut de ce champ de bataille. Au bout de quelques kilomètres, nous nous faisons héler par un couple d’auto-stoppeurs que nous acceptons de prendre un peu à contre cœur. Nous les déposerons dans un camping et le lendemain matin nous sentons obligés de les amener encore 400 kilomètres plus loin.

Alors oui malgré notre enthousiasme initial lorsque nous avons pris nos premiers auto-stoppeurs à Ushuaïa (je ne compte pas Cornelius le mémomnite et la paysanne quechua en Bolivie), nous commençons à nous lasser de devoir passer tous les jours avec d’énormes sacs à dos dans notre cuisine, salle de bain, salle à manger, chambre. Contrairement à une voiture particulière qui va souvent directement d’un point A à un point B nous nous arrêtons régulièrement pour prendre une photo ou un café, faire l’école et … vider les toilettes.

L’autostoppeur est dépendant et patient, alors il accepte que tu t’arrêtes, certains acceptent que tu ne fasses que 2 kilomètres, l’autostoppeur ne soupçonne pas que nous sommes très lents car il n’a aucune idée de l’état de la route et du fait que le camping-car est (essentiellement grâce à Bertrand) significativement beaucoup plus lent que n’importe quel autre véhicule et quand nous le prenons pour une cinquantaine de kilomètres, ça peut durer, durer … 1h souvent 2h suivant l’état de la route.

L’auto stoppeur parle beaucoup de langues, pas forcément les mêmes que nous cependant …

L’auto stoppeur a envie d’en savoir davantage sur nous, c’est sympa de sa part …

L’auto stoppeur va dans la même direction que nous, encore et encore …

Bref, on ne prend plus systématiquement les auto stoppeurs depuis Noël (super l’esprit de Noël !).

On culpabilise quand même, quand on passe devant eux à toute allure on a une gestuelle sympathique maintes fois répétées (un mélange de haussement d’épaules désolé, un geste vers le coté qui veut signifier que nous allons bientôt nous arrêter pour faire l’école / manger / dormir / faire les courses ou un autre vers l’intérieur du camping-car qui veut dire on n’a pas de place à cause des enfants qui dorment, ou à cause des autres auto-stoppeurs). Pas évident qu’ils comprennent exactement tout ça, mais ils ont l’air satisfait – un couple d’auto stoppeurs que nous avions pris au retour d’Ushuaia nous a dit qu’un automobiliste leur avait fait un doigt d’honneur, du coup on est plus sympa que lui !

Parfois on ment … plutôt mal (quand on nous aborde à l’arrêt : « non, nous n’allons pas au site hypra touristique qui est au bout de cette route ou il n’y a rien d’autre à faire, non, non on va plutôt rester toute la journée dans cette station service en plein soleil… ».

Depuis Noël, on a pris une petite dizaine d’auto stoppeurs (une fliquette chilienne qui rejoignait son poste, un kayakiste français qui repartait chercher sa voiture en amont du cours d’eau qu’il venait de descendre …), cela m’a permis de roder un peu mon espagnol. On a fait des rencontres vraiment sympas et Léonard a fait d’interminables partie de mille bornes et de Uno (évitant ainsi quelques heures d’écrans).

Amis auto-stoppeur, nous te trouvons souvent très sympathiques, souvent tu nous inspires la pitié, assis sur ton énorme sac dans la pluie ou sous le soleil, souvent aussi on a envie d’être peinards dans notre maison roulante, aller faire pipi la porte ouverte, jouer à candy crush sur la tablette ou juste pas parler …

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